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Polyvalvulopathies

Les cardiopathies congénitales (bicuspidie, Marfan) et les lésions acquises (dégénérescence myxoïde, RAA, endocardite, carcinoïde, agents toxiques) concernent fréquemment plusieurs valves. Vingt pourcent des patients souffrant de valvulopathies présentent des pathologies valvulaires multiples [2]. Elles peuvent se présenter sous forme de maladie combinant sténose et insuffisance de la même structure, ou sous forme d'affections associant plusieurs valves. Dans ces cas, la lésion dominante est déterminée par le degré de remaniement des cavités cardiaques et par la silhouette en 4-cavités (Vidéo et Figure 26.4).


Vidéo: vue long-axe 130° dans un cas de polyvalvulopathie associant une maladie mitrale (insuffisance et sténose) et une insuffisance aortique. Les deux insuffisances sont modestes d'après la dimension de leurs jets; par contre la sténose mitrale paraît serrée. La dilatation de l'OG et la petite taille du VG parlent pour une prédominance hémodynamique de la sténose mitrale.
 
  • Prédominance d’insuffisance mitrale : dilatation de l’OG et du VG;
  • Prédominance de sténose mitrale : immense OG et petit VG;
  • Prédominance d’insuffisance aortique : dilatation majeure du VG (l'IA cause la pus forte dilatation du VG);
  • Prédominance de sténose aortique : HVG concentrique, dilatation de l’OG;
  • Prédominance d’insuffisance tricuspidienne : dilatation de l’OD et du VD, bascule des septas dans les cavités gauches.


Figure 26.4 : Lors de valvulopathies, la silhouette des chambres cardiaques indique le remodelage des cavités gauches secondaire aux contraintes fonctionnelles et permet de déterminer quelle est la pathologie dominante. A : sténose aortique ; HVG concentrique et dilatation de l’OG. B : sténose mitrale ; petit VG et gigantesque OG. C : insuffisance aortique ; dilatation massive du VG, dilatation modérée de l’OG. D : insuffisance mitrale ; dilatation du VG et de l’OG.

Ces remodelages sont absents en cas de lésion aiguë (endocardite, rupture de cordage). Une valvulopathie influence le flux à travers les autres valves. Les valeurs hémodynamiques sont modifiées par l'altération des conditions de charge qui se répercutent sur tout le circuit intracardiaque. Elles doivent être réinterprétées en fonction de cette donnée (Tableau 26.12) [4,5].
 
  • L’insuffisance aortique (IA) cause une sous-estimation du degré de sténose mitrale (SM) par le temps de demi-pression, parce qu’elle augmente la Ptd du VG en cours de diastole. Les deux pathologies produisent un jet diastolique en direction de l'apex; le jet d'IA dure plus longtemps et sa vélocité est plus élevée que celui de la SM.
  • L’insuffisance aortique augmente le gradient à travers une sténose aortique à cause du grand volume systolique.
  • La sténose mitrale diminue le gradient à travers une sténose aortique (SA) à cause du petit volume systolique. L'HVG concentrique et la dysfonction diastolique liées à la SA invalident le calcul de la surface mitrale par le temps de demi-pression. L'équation de continuité est utilisable pour autant qu'il n'y ait pas d'insuffisance associée.
  • L’insuffisance mitrale (IM) induit une surestimation du degré de sténose mitrale à cause de l’augmentation du flux et du gradient diastoliques.
  • La sténose aortique augmente le degré de régurgitation mitrale par élévation de la postcharge du VG. La SA et l'IM donnent toutes deux naissance à un jet systolique de haute vélocité s'éloignant de l'apex; ils se différencient par leur durée (plus longue pour l'IM) et leur Vmax (plus élevée pour l'IM) (voir Figure 26.112). La présence de l'IM masque la dysfonction ventriculaire engendrée par la SA. L'IM tend à régresser après la levée de l'obstacle aortique lorsqu'elle est modérée et fonctionnelle mais non lorsqu'elle est structurelle.
  • Dans la combinaison IM + SM, l'équation de continuité et le temps de demi-pressions ne sont pas utilisables; par contre, la technique du PISA reste adéquate pour déterminer la taille des orifices antérograde et rétrograde.
  • La combinaison IA + IM induit la plus forte surcharge de volume et la plus grande dilatation du VG. Les mesures de la vena contracta et du PISA restent valides pour chacune des valves.
  • Une insuffisance tricuspidienne (IT) plus que modérée est une découverte fréquente lors d'opération pour une valvulopathie gauche. Sa présence péjore le pronostic à long-terme du remplacement ou de la plastie aortique ou mitrale. Actuellement, il est recommandé de procéder à une plastie tricuspidienne "en passant" si le diamètre de l'anneau tricuspidien est > 40 mm (> 21 mm/m2) en vue 4-cavités en télédiastole, quelle que soit l'importance de l'IT [1,3].

D'une manière générale, les mesures peu dépendantes de l'hémodynamique sont préférables, comme la taille de la vena contracta ou celle de l'orifice de régurgitation dans les insuffisances et la planimétrie de l'ouverture dans les sténoses [4].

 
Polyvalvulopathies
Vingt pourcent des malades souffrant d'une pathologie valvulaire ont aussi des lésions sur une autre valve. Le remodelage des chambres cardiaques permet de déterminer quelle est la lésion dominante. D'une manière générale, les sténoses sont plus contraignantes que les insuffisances. Les techniques de quantification doivent être adaptées à chaque combinaison particulière.


© CHASSOT PG, BETTEX D. Octobre 2011, Juin 2019; dernière mise à jour, Mars 2020


Références
 
  1. BAUMGARTNER H, FALK V, BAX JJ, et al. 2017 ESC/EACTS Guidelines for the management of valvular heart disease. Eur Heart J 2017; 38:2739-91
  2. IUNG B, BARON G, BUTCHART EG, et al. A prospective survey of patients with valvular heart disease in Europe: the Euro Heart Survey on valvular heart disease. Eur Heart J 2003; 24:1231-43
  3. NISHIMURA RA, OTTO CM, BONOW RO, et al. 2014 AHA/ACC Guideline for the management of patients with valvular heart disease. Circulation 2014; 129:e521-e643
  4. UNGER P, MAURER G. Heart valve disease: mixed valve disease, multiple valve disease, and others. In: LANCELOTTI P, ZAMORANO JL, HABIB G, BADANO L. The EACVI Textbook of echocardiography. Oxford: Oxford University Press, 2017, 317-23
  5. ZOGHBI WA, ADAMS D, BONOW RO, et al. Recommendations for noninvasive evaluation of native valvular regurgitation: a report from the ASE developped in collaboration with the SCMR. J Am Soc Echocardiogr 2017; 30:303-71