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Cardiac anesthesia


Right from the beginning of cardiac surgery, the anesthetists played, de premier plan dans les résultats opératoires. Potts le mentionnait déjà en 1946: "Dans ce type d'opération, une anesthésie experte est essentielle" [22]. Mais la technique d'anesthésie a évolué considérablement au cours de ce demi-siècle. 
 
Pour la première ligature de canal artériel par Robert Gross (Boston 1938), l'anesthésiste était une infirmière, Ms. Betty Lank; elle avait utilisé du cyclopropane au masque; son principal monitoring était un doigt sur l'artère temporale de l'enfant [8]. La plupart des enfants opérés par la suite (ligature de canal artériel, shunt de Blalock-Taussig, anastomose aorto-pulmonaire) était cyanosée, hypodynamique et parfois moribonde. La technique consistait en une prémédication à la morphine-scopolamine, une intubation avec ventilation contrôlée, et une anesthésie au cyclopropane; une canule dans la saphène permettait la perfusion liquidienne. La chirurgie intracardiaque commença avec une commissurotomie mitrale à ciel fermé (Charles Bailey, Philadelphie 1948); pour ce cas, K.K. Keown avait réalisé l'anesthésie avec un mélange d'oxygène et de N2O (50/50 à 30/70); le malade était intubé en spontanée sous une anesthésie topique et ventilé manuellement. L'analgésie était assurée par des injections intraveineuses de procaïne 0.2% et l'inconscience par des supplémentations de thiopenthal. Le monitoring consistait en une pression-brassard et un ECG sur oscilloscope. Le patient fut extubé sur table [11]. Cette technique, accompagnée de suppléments de morphine et d'infiltrations intercostales de procaïne, se répandit largement.
 
Les premiers remplacements valvulaires avaient lieu chez des malades souffrant d'insuffisance aortique massive. Ils étaient intubés éveillés avec une anesthésie locale, puis endormis avec de faibles doses de thiopental et maintenus avec un mélange O2/N2O supplémenté d'éther et de morphine; la tubocurarine était utilisée dans certains centres. Le monitoring se résumait toujours à une pression-brassard et un ECG [18]. La mortalité opératoire était de 20%. AW. Conn, à Toronto, introduisit l'halothane en 1959; il fut aussi le premier à décrire le cathétérisme de l'artère radiale pour mesurer la pression de manière invasive [5]. A noter que ce cathétérisme se faisait par dissection à ciel ouvert et non par ponction percutanée (introduite en 1970 seulement). 
 
Au cours de la dizaine d'années suivantes, l'anesthésie pour la chirurgie en CEC s'établit autour de la même technique de base décrite ci-dessus; le monitorage était déjà bien codifié: ECG 3-dérivations, cathétérisme artériel et veineux central, températures rectale et oesophagienne, contrôle fréquent des gazométries artérielle et veineuse [20]. En 1967, Earl Wynands (Royal Victoria Hospital, Montréal) définit les exigences de l'anesthésie pour la chirurgie coronarienne: prémédication généreuse, anesthésie profonde, monitoring invasif, contrôles fréquents des gaz sanguins et du potassium, maintien de la pression artérielle de base (néosynéphrine), assistance ventilatoire postopératoire de 4-24 heures en soins intensifs [30]. La mortalité opératoire n'était plus que de 1.3%. Lowenstein (Massachusetts General Hospital, Boston) proposa en 1969 d'administrer de hautes doses de morphine (0.5 – 3 mg/kg iv) pour gagner en stabilité hémodynamique et supprimer la stimulation sympathique néfaste [15]; l'administration de fortes doses de narcotique et d'un curare devint ainsi l'emblème de l'anesthésie dite "cardiaque". Par la suite, on préféra les hautes doses de fentanyl (50-100 mcg/kg), qui abaissait moins les résistances artérielles que la morphine [27]. En Europe, la neuroleptanesthésie (fentanyl – dropéridol – curare et ventilation avec un mélange 30/70 d'O2/N2O) devint très populaire et fut couramment utilisée pour les interventions en CEC. En 1976, Joel Kaplan introduisit la perfusion peropératoire de nitroglycérine lors des pontages aorto-coronariens et recommanda l'utilisation de la dérivation V5 pour diagnostiquer les épisodes ischémiques [9,10]. C'est au cours de la même période que se répandit l'usage du cathéter de Swan-Ganz pour évaluer plus finement l'hémodynamique [28].
 
Dès le début des années quatre-vingt, on a associé différents agents hypnogènes: isoflurane, flunitrazépam, midazolam, étomidate, propofol, sevoflurane. De nouveaux morphinomimétiques ont été introduits (alfentanil, sufentanil, rémifentanil), dans le but d'obtenir davantage d'effet hypnotique et de raccourcir la phase postopératoire ; la pharmacocinétique de ces nouvelles substances permit l’utilisation de perfusions continues et le maintien d’une grande stabilité dans les effets recherchés. L’anesthésie loco-régionale a fait son apparition dans l'espoir de réduire la réponse physiologique au stress (stress-free anaesthesia) par une sympathicolyse cardiaque, et de trouver un meilleur équilibre entre la profondeur de l'analgésie et la possibilité d'un réveil accéléré [3,14]. La péridurale ne s'est cependant jamais imposée en chirurgie cardiaque. Ces modifications ont pu diminuer la morbidité dans certaines circonstances, mais n’ont pas permis de modifier significativement le devenir des patients. 
 
A propos de l’impact de l'anesthésie en chirurgie cardiaque, Slogoff et Keats (Texas Heart Institute, Houston) avaient démontré en 1985 que l'incidence de l'ischémie peropératoire génératrice d’infarctus lors de pontages aorto-coronariens n'était pas corrélée à la technique d'anesthésie elle-même, mais bien à la performance de chaque anesthésiste [25]. L'article est resté fameux pour une mortalité excessive liée à l'anesthésiste n° 7 de l'étude ! Trois publications ultérieures portant sur plus de 1'000 patients chacune ont confirmé que le choix de la technique n'influence guère le devenir des patients; seule compte la qualité de l'anesthésiste [17,26,29]. Trente ans plus tard, deux nouvelles études ont obtenu des résultats complètement différents. La première a découvert que seuls les malades à haut risque pâtissent des prestations de l'anesthésiste lorsque celui-ci se situe dans le quartile inférieur d'une l'échelle de performance [7]. La deuxième a mis en évidence que la variabilité  des résultats d'une opération cardiaque tient pour 95% aux risques propres du patient, pour 4% à la performance du chirurgien et pour 1% seulement à celle de l'anesthésiste [19]. Que s'est-il passé pour expliquer une telle dissonance à un quart de siècle d'intervalle ? Cinq éléments peuvent être invoqués pour tenter de répondre à la question [6].
 
  • La compréhension de l'hémodynamique et de la cardiologie a progressé à grands pas.
  • La pharmacopée a mis à disposition un vaste éventail de médicaments aux propriétés précises, dont certains améliorent le devenir des patients comme les halogénés, les ß-bloqueurs ou le levosimendan chez les malades ischémiques [2,12,13,21]. La technologie a développé de nouveaux systèmes de prise en charge (ventilateurs sophistiqués, ultrasons de ponction, etc) et de monitorage (saturation cérébrale en O2, BIS, échocardiographie transoesophagienne, etc) qui augmentent la sécurité des malades [13].
  • La formation des anesthésistes cardiovasculaires s'est considérablement améliorée, notamment avec l'introduction de l'échocardiographie; celle-ci leur a fourni un immense bagage de connaissances cardiologiques, hémodynamiques et physiopathologiques qui a imprégné toute leur pratique.
  • De nombreux protocoles et recommandations (Guidelines) basés sur les évidences acquises et rédigés par des experts ont défini la meilleure stratégie pour les situations difficiles.
  •  La standardisation de la pratique a instauré des routines fiables qui limitent l'improvisation et imposent des procédures bien codifiées. 

Un élément majeur dans le perfectionnement de l'anesthésie cardiaque a été l'introduction de l'échocardiographie transoesophagienne (ETO). La première application de l'ETO comme monitorage peropératoire de la fonction ventriculaire revient à M. Matsumoto (Albert Einstein College of Medicine, New York 1980); il ne s'agissait d'ailleurs que d'une fonction M-mode, difficile à utiliser [16]. Les premières images bidimensionnelles ETO ont été obtenues par Schlutter et Hanrath en 1982 [24]. La même année, l'ETO était essayé sur des malades en salle d'opération par Michael Cahalan et Michael Roizen de UCSF (San Francisco), dans le but d'évaluer en continu la volémie, la fonction et l'ischémie [1,23]. Ce fut une véritable révolution lors de leur présentation à l'ASA, en grande partie parce que plusieurs grands patrons de l’époque jugèrent cette innovation prétentieuse et sans avenir ! La technique fut complétée ultérieurement par le Doppler couleur, et se révéla plus sensible que l'ECG pour le diagnostic des ischémies lors de pontages aorto-coronariens, comme le démontrèrent F. Clements et N. DeBruijn à Duke University [4]. L'ETO fait maintenant partie du monitorage routinier en chirurgie cardiaque, et les fabricants ont apporté de multiples perfectionnements à l'instrumentation au cours des dix dernières années (Doppler tissulaire, images tridimensionnelles, miniaturisation des appareils et des sondes, appareils portables, etc).
 
 
Histoire de l'anesthésie cardiaque

L'anesthésie cardiaque a suivi les progrès techniques de l'anesthésie au XXème siècle. Elle a passé successivement du cyclopropane, du protoxyde et de la morphine à la neuroleptanesthésie avec fentanyl-dropéridol, puis aux halogénés modernes et aux nouveaux fentanils. Elle a utilisé pour l'induction le thiopental et le midazolam, puis le propofol et l'étomidate. Elle a perfectionné sa pharmacopée, son monitorage et sa technologie, et a inclus l'ETO de routine dès 1990. La formation des anesthésistes cardiovasculaires s'est améliorée, notamment grâce à l'échocardiographie et à la standardisation de la pratique par de nombreux protocoles et recommandations.
 

© CHASSOT PG Avril 2007 Mise à jour Janvier 2012, Juillet 2017


Références
 
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