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Options chirurgicales 

Transplantation cardiaque
 
La transplantation est le meilleur traitement de l’insuffisance cadiaque terminale. Elle devrait être envisagée lorsqu'un malade de classe fonctionnelle III ou IV reste symptomatique malgré un traitement médical maximal et qu'aucune thérapeutique chirurgicale étiologique n'est possible. Les résultats actuels sont globalement les suivants [6,12,14,19,20] :
 
  • Survie à 1 an:                    82-90 %
  • Survie à 3 ans:                  80 %
  • Survie à 5 ans :                 69%
  • Survie à 10 ans:                > 50 %
  • Réhabilitation:                   85 %
  • Causes de décès:    
    • Rejet:                       39 % (rejet précoce : 3.8%)
    • Infection:                  36 %
    • Cardiaque:               21 %
En comparaison, la mortalité annuelle des candidats à une greffe cardiaque non-transplantés sous traitement médical seul est de 40-55 %. Les candidats sont des patients de moins de 70 ans, sans infection ni tumeur ni insuffisance rénale (clairance créatinine > 50 mL/min), de classe fonctionnelle III ou IV, dont l'espérance de vie est inférieure à un an. Afin que le cœur droit du donneur puisse fonctionner normalement, les RAP du receveur doivent être inférieures à 500 dynes•sec•cm-5 (6 U Wood) et le gradient transpulmonaire (PAPmoy – PAPO) doit être inférieur à 15 mm Hg (normal: 6-8 mmHg) [15,17]. Le sujet est traité dans le chapitre 17 (Transplantation cardiaque, Indications et résultats). Le plus gros problème de la transplantation est actuellement un manque lancinant de donneurs.
 
Cardiomyoplastie
 
La cardiomyoplastie dynamique consiste à ceinturer le ventricule défaillant par un lambeau musculaire pédiculé de grand dorsal dont la contraction est réglée par un pace-maker; ce muscle fonctionne comme une assistance péri-ventriculaire, et limite la dilatation cardiaque [18]. Comme il faut environ 6 semaines au muscle pour être adapté à sa nouvelle fonction, cette technique n'est pas envisageable en cas d'insuffisance aiguë. La meilleure indication est la cardiomyopathie dilatative idiopathique à fonction encore conservée (FE > 0.35) chez des malades de classe III qui présentent des contre-indications à la transplantation. Passé une mortalité périopératoire voisinant 10%, la survie à une année est de 69%, et l'amélioration fonctionnelle significative [10]. Cette intervention reste une méthode non prouvée à large échelle, qui est maintenant abandonnée.
 
Réduction ventriculaire
 
La loi de Laplace stipule que la tension de paroi augmente avec le rayon de la sphère. De plus, le VG défaillant perd sa forme conique pour devenir sphérique. Il est donc logique de réduire le stress que doit vaincre le ventricule dilaté en diminuant sa taille et en lui restituant sa forme elliptique. La ventriculectomie gauche partielle (opération de Batista) consiste en une résection d'une tranche longitudinale de la paroi ventriculaire entre les piliers de la valve mitrale, accompagnée d'une plastie de cette dernière pour éliminer la régurgitation induite par la dilatation. Si nécessaire, on réalise aussi une plastie tricuspidienne. Le meilleur bénéfice est obtenu lorsque le VG est très dilaté (diamètre télédiastolique > 8 cm) et lorsque la fonction du VD est conservée. L'évolution postopératoire immédiate est très difficile, et la contrepulsion intra-aortique ou l'assistance ventriculaire sont le plus souvent nécessaires. La mortalité périopératoire est en moyenne de 15-30% et la survie à un an de 40% ; l'incidence d'arythmies et de mort subite est élevée, mais la moitié des survivants jouit d'une amélioration symptomatologique momentanée [5,16]. Cette intervention est abandonnée à cause du risque opératoire prohibitif et de l’absence de bénéfice à long terme. 
 
D’autres types de reconstruction ventriculaire se sont développés, basées sur la diminution du stress de paroi et sur la restauration de la forme physiologique du VG : ablation des zones cicatricielles après infarctus, anévrysectomie avec insertion de patch en Dacron (opération de Dor), emballage externe des deux ventricules dans un sac conique tressé fixé au sillon auriculo-ventriculaire qui restitue la forme elliptique du VG (système CorCap™) [4,8]. Toutefois, malgré la réduction des dimensions ventriculaires, la diminution de l’IM et l’augmentation de la FE, ces interventions ne présentent pas d’avantage de morbi-mortalité à long terme et péjorent la fonction diastolique [21]. Un autre système, consistant en un tenseur intraventriculaire, rapproche les parois dans l’axe antéro-postérieur, mais les résultats sont plutôt décevants. Outre le risque opératoire, un des problèmes majeurs est la dysfonction diastolique massive qui résulte de la restriction imposée à la paroi du VG. De plus, le ventricule se re-dilate dans l’année qui suit [8]. L’amélioration de la fraction d’éjection ne doit pas faire illusion, car la réduction du volume télédiastolique conduit toujours à une augmentation de la FE puisque celui-ci se trouve au dénominateur dans le calcul (FE = (Vtd – Vts) / Vtd) ; c’est un artifice mathématique sans relation avec la fonction myocardique réelle. La réduction pratiquée simultanément au traitement chirurgical de l’ischémie coronarienne (PAC) ou de la valvulopathie (plastie mitrale) ne réduit ni la mortalité ni la morbidité cardiaque chez les malades en insuffisance gauche : dans l’étude STITCH (2'136 patients avec FE < 0.35), la mortalité opératoire est de 4-6% et la survie à 5 ans de 60% dans les deux groupes de malades (PAC seuls ou PAC + réduction VG) [11].
 
Pontages aorto-coronariens
 
Bien que le risque opératoire et la mortalité augmentent parallèlement au degré d’insuffisance cardiaque, la revascularisation est le meilleur traitement étiologique de la cardiomyopathie ischémique, dans la mesure où le myocarde ischémié est encore viable. Le myocarde peut souffrir d'hibernation (akinésie liée à une hypoperfusion coronarienne), de sidération (akinésie sur accident ischémique persistant lorsque la vascularisation est rétablie) (voir Chapitre 5, Hibernation), de lésions structurelles, de fibrose ou de nécrose. Il ne bénéficie d'une revascularisation que s'il est encore viable et que s'il peut récupérer fonctionnellement, comme en cas d'hibernation ou de sidération. Ceci n'est pas toujours facile à déterminer vu la mixité des lésions qui contiennent de nombreuses zones différentes [2]. L'échocardiographie permet de s'en faire une idée: le myocarde récupérable est charnu et structurellement normal, même s'il est akinétique; il réagit à un test à la dobutamine. Les zones fibrosées sont au contraire amincies et échodenses. L'IRM avec injection de gadolinium est plus performante; elle est considérée comme la meilleure investigation pour déterminer la viabilité myocardique. Le PET-scan est également une excellent moyen à cet effet, mais sa disponibilité est limitée [1]. Si > 10% du myocarde est récupérable, la revascularisation est bénéfique [2]. Dans ce cas, l'amélioration de la survie des patients est de 29% [23].
 
Passée la période périopératoire dangereuse, la revascularisation améliore la fonction ventriculaire et la survie des malades par rapport au traitement médical : la réduction de mortalité est de 20-50% [11,22,23]. L’addition de chirurgie reconstructrice du VG réduit la dilatation ventriculaire de 20% et améliore la fraction d’éjection, mais ne modifie pas la capacité fonctionnelle ni la mortalité, bien que le degré de remodelage ventriculaire soit le principal déterminant de la survie [13,22]. La technique à cœur battant (OPCAB : off-pump coronary artery bypass), quoique techniquement plus difficile, améliore la récupération fonctionnelle immédiate et diminue le risque hémorragique ; elle peut contribuer à réduire la mortalité et la morbidité de ces cas à haut risque [7].  
 
Plastie mitrale
 
La dysfonction du VG entraîne une dilatation et une déformation sphérique de sa cavité, ainsi qu’une dilatation de l’anneau mitral. Ces trois processus concourent à empêcher la coaptation des feuillets mitraux et provoquent une insuffisance mitrale dite restrictive, parce que le mouvement des feuillets est restreint en systole (voir Figure 12.10). Une IM modérée (< III) se rencontre dans plus de la moitié des cas d’insuffisance ventriculaire gauche ; elle est un facteur de mauvais pronostic parce qu’elle reflète la gravité de l’atteinte myocardique. La correction de l’IM par valvuloplastie simultanément aux pontages aorto-coronariens améliore le résultat fonctionnel de l’opération mais ne modifie la mortalité que si l’IM est sévère (degré IV) ; d’autre part, l’IM restrictive tend à récidiver après correction [3,22]. Pour éviter les risques de la chirurgie, on peut procéder à une plastie mitrale percutanée au moyen de clips qui amarrent la partie distale de chaque feuillet l’un à l’autre, de manière similaire à l’opération d’Alfieri, ou à une annuplastie par pose d’une prothèse en arc de cercle dans le sinus coronaire [9]. La première technique s’est largement répandue (MitraClip™), alors que la deuxième a été abandonnée (voir Chapitre 10 Plastie mitrale percutanée). 
 
 
 
Chirurgie de l’insuffisance ventriculaire
Le meilleur traitement de l’insuffisance ventriculaire terminale réfractaire est la transplantation, mais elle est limitée par le manque de donneurs (environ 3’500/an). D’autres options chirurgicales sont possibles:
    - Revascularisation coronarienne en cas de cardiomyopathie ischémique
    - Plastie mitrale chirurgicale ou par technique percutanée
    - Anévrysectomie et plastie mitrale 
    - Emballage du VG
    - Tenseur intraventriculaire
 
La cardiomyoplastie et la chirurgie de réduction ventriculaire (opération de Batista) ont été abandonnées.


© BETTEX D, CHASSOT PG,  Janvier 2008, dernière mise à jour, Novembre 2018
 
 
Références 
 
  1. ALLMAN KC. Noninvasive assessment of myocardial viability: current status and future directions. J Nucl Cardiol 2013; 20:618-37
  2. ANAVEKAR NS, CHAREONTHAITAWEE P, NARULA J, GERSH BJ. Revascularization in patients with severe left ventricular dysfunction. J Am Coll Cardiol 2016; 67:2874-87
  3. BENEDETTO U, MELINA G, ROSCITANO A, et al. Does combined mitral valve surgery improve survival when compared to revascularization alone in patients with ischemic mitral regurgitation ? A meta-analysis of 2479 patients. J Cardiovasc Med 2009 ; 10 :109-14
  4. BUCKBERG GD. Congestive heart failure: Treat the disease, not the symptom – Return to normalcy. J Thorac Cardiovasc Surg 2003; 125:S41-S49
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  6. CHAMBERS DC, YUSEN RD, CHERIKH WS, et al. The Registry of the International Society for Heart and Lung Transplantation: thirty-fourth adult lung and heart-lung transplantation report – 2017; focus theme: allograft ischemic time. J Heart Lung Transplant 2017; 36:1047-59
  7. DARWAZAH AK, BU SHAM’A RA, HUSSEIN E, et al. Myocardial revascularization in patients with low ejection fraction < 35%: effect of pump technique on early morbidity and mortality. J Card Surg 2006; 21:22-7
  8. DOENST T. Surgical approaches to left ventricular reconstruction: a matter of perpective. Heart Fail Rev 2013; 18:15-25
  9. FELDMAN T, CILINGIROGLU M. Percutaneous leaflet repair and annuloplasty for mitral regurgitation. J Am Coll Cardiol 2011; 57:529-37
  10. FURNARY AP, JESSUP M, MOREIRA FLP. Multicenter trial of dynamic cardiomyoplasty for chronic heart failure. J Am Coll Cardiol 1996; 28:1175-9
  11. JONES RH, VELAZQUEZ EJ, MICHLER RE, et al. Coronary bypass surgery with or without surgical ventricular reconstruction. N Engl J Med 2009; 360:1705-17
  12. JORDE UP, KUSHWAHA SS, TATOOLES AJ, et al. Results of the destination therapy with a continuous flow left ventricular assist device: a prospective study using INTERMACS registry. J Am Coll Cardiol 2014; 63:1751-7
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  14. LUND LH, EDWARDS LB, KUCHERYAVAYA AY, et al. The Registry of the International Society for Heart and Lung transplantation: Thirty-second official Adult Heart Transplantation Report-2015. Focus theme: early graft failure. J Heart Lung Transplant 2015; 34:1244-54
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12 Anesthésie et insuffisance ventriculaire