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Le burnout au bloc opératoire
Une enquête réalisée au sein du bloc opératoire du CHUV avait donné les résultats suivants pour l’ensemble des personnes interrogées (voir les détails dans Annexe) [1] :
Epuisement émotionnel | Dépersonnalisation | Manque d’accomplissement personnel |
Elevé : 25% | Elevé : 26% | Elevé : 32% |
Modéré : 47% | Modéré : 65% | Modéré : 37% |
Bas : 28% | Bas : 9% | Bas : 31% |
Les femmes sont nettement plus marquées que les hommes par l’épuisement émotionnel (33% versus 16% pour le score élevé) et souffrent davantage du manque d’accomplissement personnel (39% versus 24%). Les instrumentistes ont les scores les plus importants pour toutes les composantes du burnout ; les médecins ont un meilleur sentiment d’accomplissement personnel que les infirmières ; il existe un clivage très significatif entre les résultats groupés du personnel fixe du bloc opératoire (instrumentistes et anesthésistes) et ceux des chirurgiens ; ces derniers sont moins épuisés émotionnellement et ont un meilleur sentiment d’accomplissement personnel. D’une manière générale, il n’y a pas de différence entre les groupes pour la dépersonnalisation : les 91% des personnes interrogées se situent dans les catégories de score moyen et élevé; cette donnée met en évidence le fait que les spécialités du bloc attirent naturellement des individus qui ne recherchent pas un contact humain poussé avec les malades. De ce point de vue, la deuxième composante du burnout ne contribue pas à déterminer l’importance de l’épuisement professionnel dans la population d’un bloc opératoire. La troisième composante doit être interprétée en fonction des caractéristiques propres à des services de soutien : la cohorte interrogée se réparti en trois tiers presqu’égaux, avec une légère prédominance dans le groupe supérieur (38% de manque grave). Là non plus, le test ne discrimine pas l’importance du burnout ; ce fait illustre essentiellement la perte d’estime de soi propre aux membres des services de soutien, qui sont gratifiés davantage pour leur disponibilité que pour la qualité de leur travail, et qui ne bénéficient pas auprès des patients de l’aura d’une discipline thérapeutique. Ils souffrent notamment d’une absence de contrôle sur leur charge de travail (modifications de programme, horaires prioritaires des chirurgiens, interruptions, surveillance de plusieurs cas de front, urgences). La photographie obtenue du bloc opératoire donnée par les réponses sur le burnout est nettement plus pessimiste que la plupart des enquêtes analogues réalisées jusqu’ici dans les milieux hospitaliers, notamment en ce qui concerne l’image de soi. Elle est par contre confirmée par des études américaines récentes, qui montre un score de burnout élevé (> 40%) dans le personnel du bloc opératoire [2,3] ; dans ce travail, les assistants ont un score nettement plus élevé que les médecins cadres et que les infirmières, mais tous ressentent un manque de gratification par rapport à leur investissement professionnel et tous manifestent des attentes irréalistes par rapport à leur activité médicale.
Coût du burnout
Si l’on en parle ici, c’est que l’épuisement professionnel a un coût évident en terme de sécurité. En effet, les performances techniques et la vigilance des gens épuisés diminuent significativement. Cette baisse compromet gravement la qualité du travail d’une équipe dans 50% des cas [5]. De plus, le burnout se traduit par une fatigue chronique, une dépression, un absentéisme et un risque d’accident professionnel qui représentent, toutes professions confondues, une perte de 4.2 milliards de francs par an en Suisse [4]. Le risque d'alcoolisme et de suicide est doublé [2]. Beaucoup de médecins finissent pas abandonner leur carrière professionnelle, ce qui est un gâchis considérable.
Le burnout |
Le syndrome d’épuisement professionnel des soignants, ou burnout, est lié à une relation d'aide qui ne fournit plus la gratification que l'individu en attend. Il est caractérisé par 3 composantes: - L’épuisement émotionnel - La dépersonnalisation - La perte de l’estime de soi Il atteint essentiellement des personnalités normales, très investies dans leur engagement, qui travaillent dans des services de soutien à haut risque (anesthésistes, urgentistes, intensivistes) ou dans des soins à faible incidence thérapeutique (cancérologie, soins palliatifs) Les personnes émotionnellement épuisées peuvent devenir un facteur de risque pour la sécurité |
© CHASSOT PG CLAVADETSCHER F Mars 2010, mise à jour Janvier 2012, Juillet 2017
Références
- CHASSOT PG, PEZZOLI A, FRASCAROLO P, THORIN D. Stress et syndrome d’épuisement professionnel dans un bloc opératoire. Rapport CHUV, Lausanne, 2002
- DE OLIVEIRA GS, CHANG R, FITZGERALD PC, et al. The prevalence of burnout and depression and their association with adherence to safety and practice standards: a survey of United States anesthesiology trainees. Anesth Analg 2013; 117:182-93
- HYMAN SA, MICHAELS DR, BERRY JM, et al. Risk of burnout in perioperative clinicians. A survex study and literature review. Anesthesiology 2011; 114:194-204
- RAMACIOTTI D, PERRIARD J. Les coûts du stress en Suisse. Secrétariat d’Etat à l’Economie (SECO). Groupe de Psychologie Appliquée de l’Université de Neuchâtel. Septembre 2000
- RAMIREZ AJ, GRAHAM J, RICHARDS MA, et al. Mental health of hospital consultants: the effects of stress and satisfaction at work. Lancet 347:724-728, 1996