Step 6 of 7

Revascularisation coronarienne préalable

Les études des années quatre-vingt-dix avaient montré que la meilleure protection périopératoire pour la chirurgie non-cardiaque est une revascularisation complète, parce que dans ce cas, l'incidence de complications ischémiques (infarctus 0.8%, mortalité cardiaque 1.7%) est équivalente à celle de la population générale présentant les facteurs de risque équivalents mais sans maladie coronarienne [1,16]. Il existe toutefois des limites à ces données (Figure 3.12A).




Figure 3.12A : Mortalité cardiaque chez les patients coronariens opérés en chirurgie non-cardiaque. A: mortalité moins d'un mois après pontages aorto-coronariens (21%). B: mortalité entre 6 et 12 semaines après pontages aorto-coronariens (4%). C: mortalité au-delà de trois mois après pontages aorto-coronariens (< 1%) [3]. Aux mêmes délais, la mortalité de la chirurgie non-cardiaque après angioplastie percutanée et pose de stents passifs est superposable (mortalité à < 3 semaines, à 6  semaines et à > 3 mois : respectivement 26%, 4% et < 1%) [39]. D: mortalités combinées du pontage aorto-coronarien "prophylactique" (PAC) et de la chirurgie vasculaire (Chir NC): environ 7.5%. E: mortalité de la chirurgie vasculaire sous β-bloqueur : 3.4% [36]. Ces chiffres démontrent que la cardioprotection médicamenteuse est plus efficace que la revascularisation préopératoire dans les cas de coronaropathie stable, et que la revascularisation impose un délai de 3 mois pour pouvoir être bénéfique.

  • Toute manipulation coronarienne transforme une sténose en lésion instable ; cette période d'instabilité correspondant à la durée nécessaire à la ré-endothélialisation (6 semaines à 12 mois selon le type de revascularisation), pendant laquelle le risque de thrombose et d'infarctus est augmenté de 5-10 fois.
  • La mortalité de la chirurgie non-cardiaque à 3 semaines, à 6 semaines et à > 3 mois après PAC est respectivement de 21%, 4% et 1% [3,16,32]. 
  • La mortalité de la chirurgie non-cardiaque après angioplastie percutanée et pose de stents passifs (BMS) est superposable : elle est de 26%, 4% et 1% à < 3 semaines, à 6 semaines et à > 3 mois,  respectivement [39].  
  • Après des stents actifs (DES) de 1ère génération, la mortalité de la chirurgie non-cardiaque est en moyenne de 35%, 15%, 8% et 1-5% à 6 semaines, 3 mois, 6 mois et 12 mois, respectivement [37,43].
  • Le bénéfice de la revascularisation n’est complet qu’après 3-12 mois, lorsque l’incidence d’accident cardiovasculaire devient identique à celle des patients non coronariens; il est donc logique d’attendre au moins 3 mois après PCI (Percutaneous Coronary Intervention) + stents passifs ou PAC (pontages aorto-coronariens) pour toute chirurgie élective. Après des stents actifs, le bénéfice n’apparaît qu’après 3-6 mois pour les DES de 2ème génération et 6-12 mois après des DES de 1ère génération (Figure 3.12B) [37,43,46].




Figure 3.12 B : Evolution du risque d’accidents cardiaques périopératoires (mortalité, infarctus, thrombose de stent) chez les malades revascularisés, en fonction du délai entre la revascularisation et l’opération non-cardiaque. Le risque est d’autant plus grand que le délai est plus bref: il est 20 fois plus important dans les 6 premières semaines par rapport à un délai de > 6 mois. Une opération vitale peut être conduite dès 6 sem après BMS ou PAC et 6 mois après DES 1ère génération (sous bithérapie) ; elle peut être envisagée dès 3 mois après DES de 2ème génération au prix d’un certain risque (environ 5% d’accidents cardio-vasculaires) [22,37,43,46].

  • Les mortalités de la chirurgie non-cardiaque et de la revascularisation sont additionnelles. La revascularisation a une certaine mortalité (PAC 1.7%; PCI 0.1%) et fait courir un risque d'infarctus (PAC 2.4%; PCI 0.9%); chez les polyvasculaires, la mortalité des PAC est de 3-6%, celle de la PCI de 0.5-1%. Si l'on ajoute cette mortalité à celle de la chirurgie majeure ou vasculaire (1-5%), on trouve un résultat supérieur à celui de l'intervention sous préparation médicale optimale (β-bloqueur, antiplaquettaires, statines) mais sans revascularisation [3,16,32].
  • La revascularisation, lorsqu'elle est réussie, a un effet limité dans le temps; la protection offerte par des pontages aorto-coronariens dure plus longtemps (6 ans, puis diminution progressive) que celle d'une angioplastie percutanée (Percutaneous Coronary Intervention, PCI) (< 3 ans) ; la moitié des récidives survient dans un territoire différent de celui qui avait été revascularisé, traduisant ainsi la progression de la maladie [6,11].
  • L’effet protecteur de la revascularisation est le plus prononcé dans les cas de maladie tri-tronculaire, de diabète et de dysfonction ventriculaire gauche, probablement parce que la revascularisation est assurée en général par des PAC plutôt que par une PCI [21,30,47].
  • Le bénéfice de la revascularisation préopératoire est limité par le fait que près de la moitié des infarctus périopératoires survient sur des plaques instables (sténose < 60%) non dépistables par les épreuves d’effort ni par la coronarographie. D’autre part, la corrélation est faible entre la localisation des nouvelles ACS survenue à l’écho de stress préopératoire et celles survenues à l’ETO peropératoire [10].

Chez les malades souffrant d’ischémie stable sans infarctus ni syndrome coronarien aigu, les études comparant des malades ischémiques revascularisés en vue d'une intervention de chirurgie vasculaire majeure à des malades non revascularisés mais traités médicalement (β-bloqueurs, antiplaquettaires, statines) n'ont pas montré de différence dans l'incidence d’infarctus et de décès cardiaques postopératoires [12,28]. La condition est un strict maintien de l’hémodynamique (fréquence cardiaque < 70 batt/min, PAM > 70 mmHg) pendant et après l’intervention. La revascularisation préopératoire n’est donc pas indiquée en cas d’angor stade I ou II (coronaropathie stable), ni dans le seul but de réduire le risque d’événement cardiaque périopératoire [9].  Elle n'a de sens que si certaines conditions sont remplies [47,49].

  • L'indication n'est pas prophylactique mais cardiologique (voir plus loin); elle est la même qu'en dehors du contexte chirurgical; elle est liée à la présence d’un syndrome coronarien instable.
  • L'ischémie est liée à un déséquilibre du rapport DO2/VO2 dû à une sténose serrée.
  • Les délais imposés entre la revascularisation et l'opération non-cardiaque (6 semaines à 12 mois) doivent être compatibles avec l'évolution de l'affection chirurgicale (tumeur, anévrysme, fracture, etc).
  • Les risques de la revascularisation sont plus élevés chez les malades polyvasculaires (mortalité des PAC : 6% au lieu de 1.7%) qui sont les plus fréquemment concernés par ce débat.
  • Les risques additionnés de la revascularisation (PAC ou PCI) et de la chirurgie non-cardiaque doivent être inférieurs au risque de l'intervention sous simple protection médicamenteuse (β-bloqueurs, antiplaquettaires, statines). Or la revascularisation augmente le risque de complications cardiaques dans le postopératoire immédiat (OR 1.5) ; à long terme, les PAC diminuent le risque cardiaque chez les polyvasculaires (OR 0.6) davantage que la PCI [2]. 

Chez les patients souffrant de maladie coronarienne stable, la PCI avec stents n’offre aucun bénéfice en terme de mortalité, d’infarctus ou de revascularisation ultérieure comparée au traitement médical, sauf en cas de dysfonction ventriculaire ou dans les suites d’un infarctus récent [19]. L’étude COURAGE, qui analyse la survie et les récidives d’ischémie chez deux groupes de patients souffrant de coronaropathie stable strictement randomisés entre traitement médical optimal et traitement médical avec PCI, n’a révélé aucune différence entre les deux groupes ni dans la mortalité, ni dans l’incidence d’infarctus, ni dans le taux d’ictus au cours d’un suivi de 3 ans [45]. L’analyse d’un sous-groupe de cette étude comprenant des malades souffrant d’angor stade III n’a pas non plus démontré de différences [25]. Toutefois, lorsqu’elle est guidée par le calcul de la FFR (fraction de flux de réserve), la PCI abaisse la mortalité et le risque d’infarctus chez les malades qui souffrent d’ischémie active, même en cas de coronaropathie stable (OR 0.32) [7]. La revascularisation a donc une place dans la coronaropathie stable lorsqu’on peut démontrer la présence d’une ischémie active persistante (voir Chapitre 9, Traitements interventionnels). D’une manière générale, par contre, on peut conclure que la revascularisation ne fait pas partie de la préparation préopératoire des malades asymptomatiques (angor stable à fonction ventriculaire conservée), puisqu’elle ne confère aucun bénéfice en terme de morbi-mortalité périopératoire par rapport à un traitement médical optimal [9,21,47,49]. 

Chez les malades qui ont fait un infarctus ou qui ont souffert d’un syndrome coronarien aigu (non-STEMI), la situation est différente. Leur mortalité à 1 an après chirurgie non-cardiaque et leur incidence de réinfarctus à 30 jours postopératoires est d’environ 50% plus basse s’ils ont été revascularisés que s’ils ont été traités médicalement : 18% versus 35% et 5% versus 10%, respectivement [24]. Pour obtenir ce bénéfice, le délai entre la revascularisation et l’opération doit être d’au moins 1 mois, car dans les 4 premières semaines, le risque de réinfarcissement est 6 fois plus élevé. D’autre part, les PAC offrent une meilleure protection que la PCI avec stents : le taux de réinfarctus est de 3.5% versus 6.1%, respectivement. Cette différence est d’autant plus marquée que le délai entre la devascularisation et la chirurgie est plus court [24]. L’avantage des PAC sur la PCI est particulièrement important en cas de coronaropathie tritronculaire, de lésion du tronc commun, de diabète et de dysfonction ventriculaire [32].

Le bénéfice de la revascularisation devient plus évident à long terme, puisqu'elle traite la maladie de base du coronaropathe. Les indications à une revascularisation en préopératoire sont donc les mêmes qu'en dehors du contexte chirurgical [15,35,47,49] : syndrome coronarien aigu (SCA) ou instable (stade III-IV), ischémie étendue ou symptomatique malgré un traitement médical optimal, tests d’effort significativement positifs, ischémie active au calcul de la FFR, anamnèse de SCA ou d’infarctus. Les indications relatives de la chirurgie (PAC) et de l’angioplastie (PCI) peuvent se formuler comme suit (voir Chapitre 9, Comparaison des thérapeutiques) [30,40,47,49].

  • Angor stable (stade I-II) à fonction ventriculaire conservée : traitement médical.
  • Maladie mono- ou bi-tronculaire sans IVA proximale : angioplastie et stent.
  • Maladie mono- ou bi-tronculaire avec IVA proximale : préférence à la chirurgie.
  • Maladie tritronculaire : préférence à la chirurgie ; angioplastie possible si anatomie favorable.
  • Tronc commun : préférence à la chirurgie.
  • Maladie tritronculaire avec tronc commun, fonction ventriculaire diminuée et/ou diabète : chirurgie.
  • En chirurgie vasculaire, les PAC semblent offrir une protection supérieure à celle de la PCI lorsqu’une revascularisation coronarienne est indiquée [44].

 

Revascularisation coronarienne préopératoire
La mortalité de la revascularisation et de la chirurgie sont additionnelles
Le risque cardiaque est très augmenté pendant 6 semaines après la revascularisation (mortalité 25%)
Le plein bénéfice n’apparaît qu’après 3 mois pour les BMS et les PAC (mortalité < 1%) et qu’après 3-6 mois pour les stents actifs (DES) de 2ème-3ème génération, ou 6-12 mois pour les DES de 1ère génération
L’angor stable (I-II) n’est pas une indication à la revascularisation préopératoire
Après syndrome coronarien aigu ou infarctus, la revascularisation coronarienne améliore le pronostic de la chirurgie non-cardiaque. 


Délais après revascularisation chirurgicale

Après des PAC, le risque opératoire est d'autant plus élevé qu'on est proche de la revascularisation; il est nettement dégressif au-delà de 6 semaines, mais il faut attendre 3 mois pour bénéficier du plein effet de l’intervention et rejoindre le taux de mortalité des malades non-coronariens. Le taux de complications ischémiques en cas de chirurgie non-cardiaque est de 30% (mortalité opératoire: 20%) pendant 4-6 semaines; il est d'environ 4% entre 2 et 3 mois, et de 1% au-delà de 3 mois (voir Figure 3.12B). On peut donc considérer un délai de 6 semaines comme le minimum pour envisager une opération non cardiaque nécessaire ou vitale; le délai de sécurité pour une intervention élective est de 3 mois [3]. 

Délais après angioplastie et pose de stents

Après PCI et pose de stent, la durée du délai est liée à celle de la réendothélialisation du stent. Dans un stent métallique simple, ou stent passif (bare metal stent, BMS), l’armature est en contact direct avec le sang pendant plusieurs semaines. Il faut attendre 6 semaines pour qu’elle soit recouverte par une couche cellulaire, qui n’est faite que de cellules musculaires lisses ; ce délai représente également la durée minimum pour la cicatrisation des lésions après un infarctus [29]. Ce n’est pas avant 3 mois que les parties métalliques sont complètement enfouies dans le tissu cicatriciel et la surface recouverte d’une néo-intima (Figure 3.13) [13]. 



Figure 3.13 : Sections de stents passifs (BMS) prises lors d'autopsies. A : Au 11 ème jour, le stent n'est recouvert que d'une fine membrane; une armature métallique est apparente, libre dans le courant sanguin (flèche bleue).  B : Après 3 mois, le stent est complètement protégé par le néo-endothélium, les armatures (S) étant profondément enfouies sous une couche cellulaire [13]. 

Tant que le stent passif n’est pas entièrement recouvert, le risque de thrombose par adhésion des thrombocytes nécessite une bi-thérapie antiplaquettaire : aspirine + clopidogrel ou prasugrel ou ticagrelor pendant 6 semaines ; l’aspirine est continuée à vie. Le taux de thrombose est ainsi inférieur à 2% pendant le premier mois et < 0.1% au-delà. Cependant, le néo-endothélium tend à proliférer, ce qui provoque un taux de resténose de 12-20% à 9-12 mois [38].

Pour remédier à la haute incidence de resténose dans les stents passifs, on a développé des stents à élution, dits stents actifs (drug-eluting stents, DES), qui libèrent progressivement des produits antiprolifératifs. Le taux de resténose est ainsi passé à 3% à 1 an et 6% à 3 ans, sans modification de la mortalité [38]. Toutefois, ce progrès s’accompagne d’un ralentissement considérable de la réendothélialisation. En effet, l’endothélialistion des stents à élution de 1ère génération ne dépasse pas 60% de leur surface jusqu’à 40 mois, alors que le 95% de la surface des stents passifs est entièrement recouverte entre 3 et 6 mois. Ce retard est plus important chez les patients avec des thromboses que chez ceux dont les stents sont perméables (Figure 3.14) [18,20]. 



Figure 3.14 : Endothélialisation des stents actifs de 1ère génération et des stents passifs sur une durée de 40 mois (étude d’autopsies) [18]. Alors que les stents passifs sont entièrement endothélialisés à < 6 mois, les stents actifs ne sont jamais recouverts à plus de 56% par une néo-intima. 

Alors qu'il est de 1-3% pendant le premier mois, le risque de thrombose de stent diminue ensuite à 0.4-0.6%/an dans les DES de 1ère génération et à 0.1-0.2%/an dans les DES de 2ème génération [33,41]. Bien qu’elle soit un événement rare, la thrombose de stent est extrêmement dangereuse, car elle correspond à l’occlusion abrupte et totale d’un vaisseau dont le flux était normal et la collatéralisation faible. Elle est grevée d’un taux d’infarctus allant de 10% jusqu’à 60% et d’une mortalité de 9-45% (moyenne 25%). La resténose, au contraire, est un événement bénin dont la mortalité est < 1%. Les prédicteurs de la thrombose de stent sont par ordre croissant d’importance [26,48] :

  • Les comorbidités : diabète, insuffisance rénale, dysfonction ventriculaire, âge avancé ;
  • La progression et l’évolutivité de la maladie coronarienne ;
  • Les indications hors recommandations (off-label indications) et les problèmes techniques;
  • La pose de stents lors de syndrome coronarien aigu ;
  • Le type de chirurgie et le délai entre la revascularisation et l’acte opératoire ;
  • L’interruption prématurée des antiplaquettaires ; cet élément est le plus important.

Sous antiplaquettaires, un stent est l’équivalent d’une coronaropathie stable ; lorsqu’on les arrête, il se comporte comme une plaque instable (voir Chapitre 29 Antiplaquettaires et maladies cardiovasculaires). Cette situation requiert donc une double thérapie antiplaquettaire prolongée (Tableau 3.9A).
 

Le données concernant les nouveaux DES (armature en alliage de magnésium ou en polymère de lactate biorésorbables) et les nouvelles substances antiprolifératives (zotarolimus, everolimus, biolimus) montrent en effet qu’une bithérapie antiplaquettaire de 3-6 mois seulement ne modifie pas le pronostic par rapport à un traitement de 12 à 24 mois dans le cas de stents à bas risque et chez des malades non-diabétiques [14,42]. Dans ces cas particuliers, on peut formuler les propositions suivantes pour la durée de la bithérapie [23,31,34].

  • DES 2ème-3ème génération et risque ischémique faible mais risque hémorragique très élevé ou opération vitale impérative: 3 mois.
  • DES 2ème-3ème génération et risque ischémique faible (stent simple, coronaropathie stable, pas de SCA): 6 mois.
  • DES 2ème-3ème génération et risque ischémique modéré sur SCA, ou DES 1ère génération: 12 mois.
  • DES 2ème-3ème génération et risque ischémique élevé (SCA avec infarctus, thrombose préalable, stent complexe, diabète), DES 1ère génération à risque, risque hémorragique faible: prolongation > 12 mois.

Ces recommandations sont à mettre en balance avec le risque hémorragique, qui augmente parallèlement à l'intensité et à la durée de la bithérapie, en gardant néanmoins à l'esprit que la mortalité liée à une thrombose coronarienne est plus importante que celle liée à une hémorragie [27]. 

Cesser la bithérapie après 3 ou 6 mois dans une situation à bas risque et une coronaropathie stable n’est malheureusement pas un scénario extrapolable sans restriction à la période périopératoire, qui est une période à haut risque accompagnée d’un syndrome inflammatoire massif et d’une hyperactivité thrombocytaire puissante. La faisabilité d’un traitement de seulement 3-6 mois avec les nouveaux stents dans le cadre d'une coronaropathie stable n’est en aucun cas un argument pour interrompre une thérapie en cours afin de programmer une intervention chirurgicale dans des délais raccourcis. D'autre part, le manque d’expérience avec les nouveaux stents dans le périopératoire oblige à rester très prudent. Le raccourcissement du délai à 3 ou 6 mois ne concerne que des cas de coronaropathie stable sans SCA ni infarctus pour des opérations vitales hémorragipares dont le renvoi met la vie du malade en danger. Dans les autres situations, le maintien de la bithérapie en cours pendant 12 mois et un délai idéal d’un an pour toute intervention élective restent une précaution prudente. Quel que soit le risque propre des stents en fonction du délai, le pronostic du patient est très fortement dépendant de son risque cardiovasculaire (anamnèse de SCA, infarctus, FE basse, AVC, etc) et de la gravité de l’intervention chirurgicale [17].

Les délais recommandés entre la revascularisation coronarienne et une intervention non-cardiaque sont donc variables selon les situations (Tableau 3.9B) [4,5,8] (voir Chapitre 29 Recommandations pour la chirurgie non-cardiaque).
 

 

Délais pour la chirurgie après revascularisation
Dilatation simple             2-4 semaines (ballon simple)
                                        6 mois (ballon à élution)

Stent métallique simple (BMS, stent passif) ou pontages aorto-coronariens (PAC)
Opération vitale                 6 semaines 
Opération élective             3 mois

Stents à élution (DES 1ère génération)    
Opération vitale                  6 mois (sous bithérapie)
Opération élective              12 mois

Stents à élution (DES 2ème génération)    
Opération vitale                   3 mois (sous bithérapie)
Opération élective               6 mois

Syndrome coronarien aigu  12 mois


© CHASSOT PG, DELABAYS A, SPAHN D, Mars 2010, dernière mise à jour, Août 2019


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