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Flux de remplissage

Les flux sont proportionnels aux gradients de pression instantanés entre la cavité d'amont et la cavité d'aval (Figure 27.7). Comme ils dépendent de la pression, les flux de remplissage sont tributaires des inconsistances propres à la relation entre la pression et le volume: ils dépendent en effet de la compliance ventriculaire. D’autre part, comme on l’a vu au Chapitre 25, ils reflètent directement l’état de la fonction diastolique. Il est donc très difficile de démêler les éléments liés à cette dernière de ceux liés à la volémie [2]. Les images de l’hypo- et de l’hypervolémie n’ont de sens que chez un individu dont la fonction ventriculaire systolique et diastolique est parfaitement normale (Figure 27.8) [1].



Figure 27.7 : Synchronisation des pressions et des flux de remplissage du VG. Les flux sont représentés par leurs vélocités pendant un cycle cardiaque. La vélocité est fonction du gradient de pression instantané entre la cavité d'amont et la cavité d'aval. La courbe rouge représente la pression auriculaire et la courbe pointillée violette la pression intraventriculaire; la surface jaune et la surface verte illustrent le gradient de pression A-V en protodiastole et en télédiastole, respectivement. Les pics de flux veineux pulmonaire correspondent aux moments où la pression dans l'OG est la plus basse; le flux veineux pulmonaire comprend une composante systolique (S) bifide (S1 : descente a-c, S2 : descende x), une composante diastolique (D, descente y) et une composante rétrograde pendant la contraction auriculaire (Ar) vu l'absence de valve dans les veines pulmonaires. Le flux mitral comprend une composante proto-diastolique (E) et une composante produite par la contraction auriculaire (A). La couleur rouge marque la phase systolique, la jaune la phase proto-mésodiastolique, et la verte la phase de la contraction auriculaire. Ce schéma est basé sur les données d’échocardiographie transoesophagienne (ETO); le flux veineux pulmonaire apparaît en dessus de la ligne de base car il se rapproche du capteur alors que le flux mitral apparaît en dessous de la ligne de base car il s’en éloigne.



Figure 27.8 : Effet de la volémie sur les flux veineux pulmonaire (FVP) et mitral, lorsqu’ils sont normaux. Comme la POG est basse en hypovolémie, la composante systolique du FVP est élevée, puisque la POG est sa pression d’aval (la valve mitrale est fermée). Par contre, le flux mitral E est faible car la POG est sa pression d’amont (pression motrice). La tachycardie fait fusionner les flux E et A en une seule onde méso-télédiastolique. En hypervolémie, la POG est haute ; la composante systolique du FVP est freinée ; la majeure partie du flux passe en diastole, lorsque la mitrale est ouverte et que le VG se relâche. L’élévation de la POG augmente la vélocité du flux E.

Comme la POG est basse lorsque la précharge est faible, la vélocité de la composante systolique du flux veineux pulmonaire est élevée, puisque la POG est sa pression d’aval (la valve mitrale est fermée). Par contre, la Vmax du flux mitral E est diminuée car la POG est sa pression d’amont (pression motrice). La tachycardie, habituelle en hypovolémie, fait fusionner les flux E et A en une seule onde méso-télédiastolique; il est normal de rencontrer un flux mitral monophasique chez un patient tachycarde (fréquence > 100 batt/min), même si celui-ci est en rythme sinusal. En hypervolémie, la POG est haute ; la composante systolique du flux veineux pulmonaire est freinée ; la majeure partie du flux passe en diastole, lorsque la mitrale est ouverte et que le VG se relâche. L’élévation de la POG augmente par contre la vélocité du flux E puisqu'elle en est la pression motrice [3]. Comme déjà mentionné, l’évaluation de la POG et de la PAPO au moyen des flux de remplissage n’est valable qu’en hypervolémie, lorsque la courbe de compliance se redresse (voir Figure 27.1). En hypovolémie, la relation n’est pas fiable.

Il existe toute une série d’indices échocardiographiques pour évaluer la pression auriculaire gauche (POG) de manière non-invasive (voir Chapitre 25, Mesures non-invasives de la POG). Malheureusement ils ont été conçus pour apprécier la stase en cas d’insuffisance ventriculaire gauche ou de valvulopathie mitrale, et ne sont valides qu’en hypervolémie. Ils ne sont d’aucune utilité pour évaluer la POG lorsqu’elle est basse.

L’examen des flux de remplissage est donc d’un apport très limité dans l’évaluation de l’hypovolémie.
 
 
Flux de remplissage et volémie
Les flux de remplissage ne sont pas efficaces pour l'évaluation de la volémie car ils sont indissociables de la fonction diastolique et dépendent des pressions de remplissage, donc sont tributaires du problème de la compliance. Ils sont inadéquats pour l'évaluation de l'hypovolémie.


© CHASSOT PG, BETTEX D. Novembre 2011, Août 2019; dernière mise à jour, Mars 2020


Références
 
  1. HOIT B, SHAO Y, GABEL M, et al. Influence of loading conditions and contractile state on pulmonary venous flow. Circulation 1992; 86:651-9
  2. NAGUEH SF, SMISETH OA, APPLETON CP, et al. Recommendations for the evaluation of left ventricular diastolic function by echocardiography: an update from the American Society of Echocardiography and the European Association of Cardiovascular Imaging. J Am Soc Echocardiogr 2016; 29:277-314
  3. NISHIMURA RA, ABEL MD, HOUSMANS PR, et al. Mitral flow velocity curves as a function of different loading conditions: evaluation by intraoperative transesophageal Doppler echocardiography. J Am Soc Echocardiogr 1989; 2:79-88

 
27 Echocardiographie, 3ème partie