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Anatomie fonctionnelle des valves

Les maladies valvulaires entraînent des modifications majeures de la précharge, de la postcharge, de la performance systolique et de la compliance diastolique. Elles induisent un remodelage des cavités cardiaques et des modifications neuro-humorales dont le but est adaptatif, mais qui dépassent progressivement les capacités de compensation du coeur. Les valvulopathies gauches ont un retentissement en amont sur la circulation pulmonaire où elles provoquent une hypertension postcapillaire. 
 
Les quatre valves cardiaques sont situées au voisinage les unes des autres à la base du cœur. Elles sont maintenues par le squelette fibreux du cœur qui est constitué de plusieurs éléments (Figure  11.1).
 
    

Figure 11.1 : Schéma anatomique des 4 valves cardiaques vues d’en-haut, après ablation des oreillettes et des troncs artériels. A: L’anneau mitral a la forme approximative d’une lettre "D" inversée (pointillé vert), dont la base fait un angle d’environ 60° avec l’horizontale. VP : valve pulmonaire. Ao : valve aortique. CG : cuspide coronarienne gauche de la valve aortique. CD : cuspide coronarienne droite de la valve aortique. NC : cuspide non-coronarienne de la valve aortique. FAM : feuillet antérieur de la valve mitrale. P1 : feston antérieur du feuillet mitral postérieur. P2 : feston médian du feuillet mitral postérieur. P3 : feston postérieur du feuillet mitral postérieur. FS : feuillet septal de la valve tricuspide. FA : feuillet antérieur de la valve tricuspide. FP : feuillet postérieur de la valve tricuspide. La double flèche rouge représente la distance intertrigonale. B: Représentation anatomique de l'anneau mitral et et de l'anneau tricuspidien; ce dernier est interrompu dans sa partie postéro-latérale. Le faisceau de conduction passe à travers le trigone droit. La structure de la valve aortique est maintenue par trois triangles fibreux délimités par l'insertion des cuspides sur la paroi des sinus de Valsalva [Extrait de Savage RM, Aronson S, Shernan SK. Comprehensive textbook of perioperative transesophageal echocardiography, 2nd edition. Philadelphia: Wolters/Kluwer – Lippincott, Williams & Wilkins, 2011, Figure 30.6, p 492].
 
  • Le trigone antérieur (ou gauche) situé entre la valve mitrale et la valve aortique.
  • Le trigone postérieur (ou droit) situé entre la valve mitrale, la valve aortique et la valve tricuspide; surplombant le septum fibreux, il est traversé par les faisceux de conduction.
  • La partie fibreuse reliant les deux trigones sur laquelle est insérée l'anneau mitral (base du feuillet antérieur).
  • L’anneau mitral fibreux, qui devient plus mince dans sa partie postérieure en regard du feston moyen du feuillet postérieur.
  • La structure fibreuse de la racine de l'aorte soutenant les 3 cuspides aortiques.
  • L’anneau tricuspidien, plus fin et interrompu dans sa partie postéro-latérale.
La valve pulmonaire, plus antérieure, ne possède pas d'anneau fibreux individualisé; la chambre de chasse droite est entièrement musculaire. 
 
Valve mitrale
 
Ce nom a été donné à la valve auriculo-ventriculaire gauche par Vésale en 1543, parce qu'elle ressemble à une mitre épiscopale. Mais la valve mitrale est un ensemble dynamique constitué de cinq éléments différents (Figure 11.2) (VM_20, VM_3D) [4,7,10].



Vidéo: Image des deux feuillets de la valve mitrale en vue mi-oesophagienne 5-cavités; le feuillet antérieur, plus long, est à gauche et le feuillet postérieur à droite. Une vue tronquée de la valve aortique apparaît tout à gauche de l'écran.


Vidéo: Vue "en-face" de la valve mitrale depuis l'OG en reconstruction tridimensionnelle; le feuillet antérieur est plus grand que le feuillet postérieur; la commissure est en forme d'arc en "C".
 
 
            

Figure 11.2 : Vue d’ensemble de l’appareil mitral. A: la valve mitrale avec son anneau, les cordages, les muscles papillaires et la paroi ventriculaire. B: le feuillet antérieur est de forme “carrée” alors que le feuillet postérieur est en croissant de lune; les piliers sont situés à la verticale des commissures; à l’occlusion, la pression systolique intraventriculaire applique les bords libres des deux feuillets l'un contre l'autre le long de la zona rugosa; la hauteur de coaptation est de 0.6-1.0 cm. La longueur des feuillets (flèche verte) est de 22-23 mm pour le feuillet antérieur et de 12-13 mm pour le feuillet postérieur [4]. C: vue intraventriculaire de l’appareil sous-valvulaire ancré sur les piliers; cette structure ressemble aux piliers et aux voûtes d’une cathédrale (D: Sagrada Familia, Antoni Gaudi, Barcelone) parce qu’ils ont la même fonction: soutenir une pression. AA: anneau antérieur (trigone fibreux). FA: feuillet antérieur. CA: commissure antérieure. CP: commissure postérieure. FP: feuillet postérieur. MPA: muscle papillaire antérieur. MPP: muscle papillaire posérieur. 
 
  • Deux feuillets; le feuillet postérieur est arciforme et subdivisé en 3 festons anatomiquement bien différenciés (P1 en avant, P2 au milieu et P3 en arrière); son insertion représente les 2/3 de la circonférence de l'anneau. Le feuillet antérieur est plus homogène et de forme plus carrée; sa division en 3 portions A1, A2 et A3 ne correspond pas à des entités anatomiques distinctes. Malgré leurs formes différentes, les deux feuillets ont une surface équivalente. La longueur des feuillets (distance entre la base et l'extrémité de A2 ou P2) est de 22-23 mm pour le feuillet antérieur et de 12-13 mm pour le feuillet postérieur. 
  • Un anneau fibreux, dont l'allure vue depuis l'OG rappelle une lettre "D" inversée, la partie rectiligne étant antérieure, au niveau du trigone fibreux (surface en télédiastole: 5-6 cm2). La partie postérieure est plus fine (voir Figure 11.1B). En trois dimensions, l'anneau mitral affiche une forme en selle dont les points les plus élevés sont antérieur (valve aortique) et postérieur; les points les plus bas sont en regard des commissures. Le diamètre AP normal est de 26-32 mm; l'élévation totale est d'environ 10 mm (Figure 11.3) [16]. En télédiastole, la contraction auriculaire amorce le rétrécissement de l'anneau. En systole, l'anneau subit 3 mouvements: sa forme en selle s'accentue, sa circonférence diminue de 25%, et il coulisse d'environ 1 cm vers l'apex ("descente" de l'anneau mitral) [11,18]. En vue ETO 4-cavités (0°), l’anneau est coupé dans sa portion basse, le point de coaptation apparaît au niveau du plan de l’anneau, alors qu’en vue long-axe (120°), il est coupé dans sa portion haute, et le point de coaptation est situé 5-7 mm en dessous du plan de l’anneau [6,14]. Ces notions sont importantes pour la définition du prolapsus mitral qui doit être déterminé en vue long-axe (120-140°). La non-planarité de l'anneau est mesurée par le rapport entre l'élévation H (distance entre le point le plus haut et le point le plus bas, 8-10 mm) et la distance intercommissurale (DIC, 30-35 mm); il est normalement de 0.2 [14]. La non-planarité est également évaluée par l'angle entre le point antérieur et le point postérieur basé sur la ligne intercommissurale; sa valeur normale est > 130° [12]. Ces mesures sont réalisées en ETO par reconstruction 3D; certains programmes les calculent automatiquement à partir de l'analyse géométrique de l'anneau (Figure 11.4). Lorsque le VG se dilate, l’anneau mitral s’arrondit et devient circulaire; il perd sa forme en selle et s’aplatit; la valve perd son étanchéité en systole et le stress sur les feuillets augmente [5]. La dilatation se fait essentiellement aux dépens de la partie postérieure.

Figure 11.3 : Configuration de l’anneau mitral. A : l’insertion septale de la valve mitrale est plus proximale que celle de la valve tricuspide, qui est plus apicale ; le décalage est de 1 cm (en vert). B : Forme en selle de l’anneau mitral, dont les points les plus élevés sont antérieur (valve aortique) et postérieur. C : en vue 4-cavités, on coupe l’anneau dans ses parties les plus basses ; le point de coaptation (flèche blanche) de la mitrale apparaît au niveau du plan de l’anneau. D : en vue long-axe, on coupe l’anneau dans ses parties les plus élevées ; le point de coaptation de la mitrale apparaît en dessous du plan de l’anneau. Cette différence entre les deux vues est importante pour la définition du prolapsus mitral [1].
 

Figure 11.4 : Forme en selle de l'anneau mitral en reconstruction tridiemensionnelle. A: les points les plus élevés sont antérieur (anneau aortique) et postérieur; ils déterminent le diamètre antéro-postérieur (DAP); les points les plus bas sont en regard des commissures de la valve et définissent le deuxième diamètre de la valve. L'élévation de l'anneau (H) est d'environ 10 mm; la distance intercommissurale (DIC) va d'une commissure à l'autre. L'angle de l'élévation (en vert) est basé sur la ligne intercommissurale et définit l'ouverture entre les deux points les plus élevés. B: Par rapport à la diastole (en haut), la forme en selle s'accentue en systole (en bas). C et D: images de reconstruction paramétrique par écho 3D (programme Q-Lab™, Philips) de l'anneau mitral et de l'anneau aortique dans deux situations pathologiques. C: restriction de la course des feuillets par dilatation ventriculaire; la coloration bleue signale la zone qui est située en-dessous du plan de l'anneau. D: prolapsus des deux feuillets dans une maladie de Barlow, avec détermination de l'angle mitro-aortique entre le plan des deux valves. A: antérieur. P: postérieur.
 
  • 25-30 cordages insérés sur la face ventriculaire des feuillets; les cordages de 1er ordre sont fixés à l'extrémité distale et ceux de 2ème ordre sur le corps des feuillets; les cordages de 3ème ordre sont attachés près de la base et maintiennent la géométrie du ventricule; les cordages mesurent en moyenne 1.5 cm de longueur.
  • Deux muscles papillaires, l'un antéro-latéral et l'autre postéro-médian, situés à la verticale des commissures; le bouquet de cordages implanté sur chaque pilier se réparti sur les deux feuillets, soit sur leur partie antérieure (pilier antéro-latéral PAL), soit sur leur partie postérieure (pilier postéro-médian PPM). Le PAL est vascularisé par deux réseaux coronariens (IVA et CX), alors que le PPM n'est vascularisé que par la CD. Le PPM est souvent bifide.
  • La paroi du VG sur laquelle est implanté chaque pilier; la contraction de cette paroi est essentielle pour assurer l'occlusion mitrale; en cas d'akinésie ou de dilatation, le défaut de raccourcissement radiaire maintient une traction excessive sur les cordages correspondants et empêche les feuillets d'atteindre leur point de coaptation (voir Figure 11.53).
En diastole, la valve mitrale présente une surface d'ouverture de 4 – 6 cm2. Son gradient est ≤ 4 mmHg; il peut s'élever lorsque le volume systolique est très augmenté (insuffisance mitrale). En systole, l'étanchéité de la mitrale est assurée par le jeu de deux forces opposées (Figure 11.5). 

    

Figure 11.5 : Contraction du VG. A : L’augmentation de la pression intra-ventriculaire en systole applique les deux feuillets de la valve mitrale l’un contre l’autre le long de leurs bords libres (flèches violettes) ; la contraction de la paroi et des muscles papillaires (MPA : muscles papillaire antérieur, MPP : muscle papillaire postérieur) tend les cordages et maintient la valve mitrale dans son plan d’occlusion (flèches vertes). L’équilibre de ces deux forces constitue le squelette interne du ventricule, qui permet au sang d’être expulsé dans la chambre de chasse du VG (CCVG) sans que le ventricule ne se torchonne sur lui-même. La contraction débute à l’apex et se termine dans la chambre de chasse. B : Si la course de la paroi postérieure et du MPP est trop longue ou si le ventricule est trop petit en systole (sur-stimulation catécholaminergique, hypovolémie, hypertrophie concentrique), la paroi postérieure se déplace vers l’avant (flèche verte) ; le point de coaptation de la valve mitrale est déplacé antérieurement vers l’aorte et se rapproche de la CCVG ; l’extrémité du feuillet postérieur est en contact avec le corps du feuillet antérieur. Le feuillet antérieur est alors repoussé vers la CCVG lorsque la pression intraventriculaire augmente pendant la systole (flèche bleue). Traitillé blanc : angle mitro-aortique.
 
  • Force d'occlusion: la pression intraventriculaire (100 – 150 mmHg) applique les bords libres des deux feuillets l'un contre l'autre le long de la zona rugosa; la hauteur de cette surface de coaptation est de 0.6 – 1.0 cm et représente 20-25% de la longueur totale des feuillets. 
  • Force de traction (tethering): la contraction de la paroi ventriculaire et des muscles papillaires assure la tension des cordages qui maintient la valve sur son plan de coaptation et l'empêche de basculer dans l'OG.
 
Si l'occlusion des feuillets mitraux se fait bord-à-bord, la valve ne peut pas résister à la pression intraventriculaire; elle perd son étanchéité et devient insuffisante. Les dimensions normales de la valve mitrale sont rapportées dans le Tableau 11.1 [13,17].
 
Les plans orthogonaux pour la valve mitrale à l'ETO sont différents des plans orthogonaux du cœur. Ces derniers sont le plan horizontal 4-cavités 0° et le plan sagittal 2-cavités 90°. Mais la valve mitrale présente une rotation horaire d'environ 60° dans le plan frontal par rapport à l'organisme (Figures 11.6). Ses plans orthogonaux sont donc le plan bi-commissural 40-60° qui la coupe par les deux commissures, et le plan long-axe 120-150° qui la coupe par la plus grande longueur des feuillets (A2 et P2); ce plan comprend la vue long-axe de la chambre de chasse gauche et de la valve aortique; il est approximativement perpendiculaire au précédent (Figure 11.7). A ces deux plans est ajouté la vue court-axe transgastrique 0-20° de la mitrale, mais cette vue n'est pas toujours réalisable.
 

Figure 11.6: Plans de coupe de la valve mitrale en ETO. Les plans de coupe orthogonaux de l'organisme (4-cavités 0° et 2-cavités 90°, en blanc) ne correspondent pas à l'orientation de la valve mitrale. Celle-ci est desaxée de 60°; ses plans orthogonaux (en bleu) sont donc le plan bi-commissural à 40-60° et le plan long-axe 120-150°, qui lui est perpendiculaire et qui coupe la chambre de chasse et la valve aortique. L'appendice auriculaire gauche (AAG) est situé en regard de la commissure mitrale antérieure. Le troisième plan orthogonal est la vue court-axe transgastrique à 0°.
 

Figure 11.7 : Vues échocardiographiques transoesophagiennes de la valve mitrale. Ce sont les vues orthogonales de la valve. A: vue long-axe 120° du VG, avec la mesure de la longueur du feuillet antérieur au niveau de A2. B: vue bi-commissurale 60°. C: vue court-axe transgastrique 0°. CC: chambre de chasse. MPA: muscle papillaire antérieur. MPP: muscle papillaire postérieur. C1: commissure antérieure. C2: commissure postérieure. Le diamètre de l’anneau mitral se mesure à 120-140° (A) et à 60° (B) [1].
 
Valve aortique
 
La valve aortique fait partie de l'ensemble dynamique qui constitue la racine de l’aorte. Cet ensemble comprend plusieurs éléments (Figures 11.8) (3D VAo + SG AP) [1,19].


Vidéo: vue court-axe de la valve aortique avec ses trois cuspides en reconstrcution tridimensionnelle; présence d'un cathéter de Swan-Ganz dans la chambre de chasse droite (katheter).
 
  • Structure aortique fibreuse en forme de couronne à 3 branches verticales remontant aux commissures des cuspides. La jonction entre la musculature de la chambre de chasse du VG et le tissu fibreux de l'aorte est abusivement décrite comme "anneau" aortique alors qu'il n'existe aucune structure anatomique propre à ce niveau.
  • Trois cuspides de forme semi-lunaire, définies par leur corps, par leur bord libre et par leur base implantée en "U" sur la paroi aortique en regard de chaque sinus de Valsalva; la base mesure 1.5 fois le bord libre. L'insertion basse des cuspides est située sur l’anneau basal, qui est anatomiquement dans la chambre de chasse du VG (CCVG), en-dessous de la jonction entre l’aorte et le VG. Les commissures sont suspendues au niveau de la jonction sino-tubulaire.
  • Trois sinus de Valsalva, qui sont des renflements de la racine aortique en regard des cuspides; la coronaire droite part du sinus droit (le plus antérieur); le tronc commun part du sinus gauche; le sinus non-coronaire est le plus postérieur.
  • Jonction sino-tubulaire entre les sinus de Valsalva et l’aorte ascendante, au niveau de laquelle sont retenues les commissures de la valve.
 


 

Figure 11.8 : La valve aortique. A: valve aortique et ses connexions anatomiques. FAVM: feuillet antérieur de la valve mitrale. MPA: muscle papillaire antérieur. MPP: muscle papillaire postérieur. CCVG: chambre de chasse du ventricule gauche. B: représentation schématique des structures de la valve aortique; la base d’implantation des cuspides (en brun) présente une forme en "U"; l’anneau aortique (en jaune) visible en échocardiographie est légèrement plus étroit que la jonction anatomique entre la structure aortique et le VG; il est également légèrement plus étroit que la jonction sino-tubulaire (en vert). *: espaces approximativement triangulaires qui sont la structure fibreuse soutenant la valve aortique [19].
 
La valve aortique est positionnée en avant de la mitrale, orientée de telle manière que le feuillet non-coronarien (NC) est postérieur, situé en face du septum interauriculaire; la cuspide coronaire droite (CD) est la plus antérieure (Figure 11.9) (Vao court axe, Vao long axe). La hauteur de chaque feuillet est de 13-15 mm, mais leur surface est légèrement asymétrique: le feuillet NC est un peu plus grand que les feuillets coronarien droit et coronarien gauche. La partie centrale des bords libres présente un renforcement fibreux correspondant à leur point de coaptation (nodule d’Arantius) ; sur la face ventriculaire des cuspides, on peut trouver des dégénérescences fibreuses (excroissances de Lambl). 


Vidéo: Vue court-axe de la valve aortique (vue mi-oesophagienne 40°) avec ses trois cuspides; la cuspide non-coronaire est à 10 heures, en face du septum interauriculaire; la cuspide coronaire droite est à 6 heures et la cuspide coronaire gauche à 2 heures.


Vidéo: Vue long-axe de la valve aortique (vue mi-oesophagienne 120°); la cuspide située vers le haut de l'écran est la non-coronarienne, la cuspide située vers le bas est la coronarienne droite. De la valve mitrale, on voit la partie centrale du feuillet antérieur (A2, plus long) et la partie centrale du feuillet postérieur (P2, plus court).
 
La valve aortique surplombe la chambre de chasse gauche, dont les parois sont constituées par le feuillet antérieur de la valve mitrale, le septum interventriculaire et la paroi postérieure du VG. Les deux valves gauches sont contiguës: la base du feuillet mitral antérieur est insérée sur le trigone fibreux en face des feuillets aortiques gauche et non-coronaire (voir Figure 11.1).
 

Figure 11.9  : Vues ETO de la valve aortique. A : vue court-axe basale rétrocardiaque mi-oesophage à 40°. B : vue long-axe 120° de la racine aortique. NC : cuspide non-coronaire. CG : cuspide coronaire gauche. CD : cuspide coronaire droite. VP : valve pulmonaire. CCVD : chambre de chasse du VD. * : départ du tronc commun. ** : départ de la coronaire droite [1]. C : le diamètre de l’anneau aortique tel qu’on le mesure en vue long-axe 120° (Ø écho LA, en vert) à l’ETO est légèrement plus étroit que le diamètre anatomique (en bleu), parce qu’il ne passe pas par le centre de l’anneau. D : en vue transthoracique (ETT) parasternale long-axe, la différence est sensiblement plus marquée [19].
 
En systole, la surface d'ouverture de la valve aortique est de 3 - 4 cm2, mais la forme de cette ouverture se modifie au cours de l'éjection (Figure 11.10) [2].
 
  • Circulaire en protodiastole, pendant le pic du flux (vélocité maximale);
  • Triangulaire pendant ≥ 70% de la durée d'éjection;
  • En étoile à 3 branches en télésystole, lorsque le flux devient faible.
     


Figure 11.10 : Ouverture de la valve aortique en systole. A : sa forme et sa surface changent au cours de l’éjection. B : dimensions de la valve aortique dans sa forme mésosystolique triangulaire isocèle ; les dimensions affichées sont les longueurs de chacun des côtés. La forme triangulaire est celle adpotée pour la mesure du volume systolique (VS = surface d'ouverture x intégrale des vélocités), parce qu'elle est celle de la valve pendant la majeure partie de la systole [2].
 
La position des cuspides ouvertes est pratiquement parallèle au flux sanguin pendant l'éjection; le flux reste laminaire (vélocité 1.0 – 1.5 m/s) et le gradient est < 10 mmHg, parce que le diamètre change très peu entre la chambre de chasse, l'anneau aortique, les cuspides et la racine de l'aorte ascendante. L'écartement du bord libre des cuspides est de 2.0 – 2.2 cm. Les sinus de Valsalva représentent un renflement de 2-3 mm par rapport à l'anneau aortique. Leur présence permet d'éviter l'accolement des cuspides à la paroi de l'aorte pendant la systole (Figure 11.11). Si elles adhéraient à la paroi en systole, les cuspides pourraient ne pas se refermer immédiatement en protodiastole; ce retard entraînerait constamment une fuite aortique. En diastole, la hauteur de coaptation des cuspides par leur bord libre est de 4-8 mm; c'est la pression diastolique aortique qui assure l'étanchéité en appuyant les cuspides l'une contre l'autre. Les dimensions normales de la valve et de la racine aortiques sont rapportées dans le Tableau 11.2 [3,13,17].
 
 
    

Figure 11.11 : Dimensions de la valve aortique et de la racine de l’aorte. A : diamètres en long axe 120° (ETO). 1 : chambre de chasse du VG ; 2 : anneau aortique ; 3 : sinus de Valsalva ; 4 : écartement des feuillets en systole ; 5 : jonction sino-tubulaire ; ces diamètres se mesurent en systole. Le diamètre de l’aorte ascendante se mesure en diastole au niveau du croisement de l’artère pulmonaire droite (non visible sur l’image). B : écartement des cuspides en systole ; elles ne sont pas collées à la paroi des sinus de Valsalva, mais distantes de 2-3 mm. Le conduit chambre de chasse – anneau aortique – cuspides – jonction sino-tubulaire – aorte ascendante est pratiquement un tube de diamètre constant ; le flux y est laminaire. C : en diastole, la hauteur de coaptation du bord libre des cuspides est de 4-8 mm ; c’est la pression diastolique de l’aorte qui les maintient occluses. 
 
Valve tricuspide
 
La valve tricuspide est montée sur un anneau fibreux incomplet, en forme de fer-à-cheval centré sur le trigone droit et interrompu dans sa partie postéro-latérale. Au niveau septal, cet anneau est situé environ 1 cm plus apical que l'anneau mitral (Figure 11.12). Il a également une forme en selle, et sa silhouette est approximativement ovoïde avec le grand axe dans le sens antéro-postérieur et la base plus large au niveau du feuillet postérieur. Son diamètre anatomique est 3 – 4 cm; en vue 4-cavités, le diamètre normal est 2.8 ± 0.5 cm [8,9]. La surface de l’anneau se rétrécit d’environ 30% en systole [15]. Comme son nom l'indique, la valve est constituée de trois feuillets, qui sont de taille inégale.
 
  • Feuillet antérieur, le plus grand et le plus mobile;
  • Feuillet postérieur;
  • Feuillet septal, le plus petit et le plus restrictif.
 

Figure 11.12 : Valve tricuspide (VTr) en situation anatomique, avec ses trois feuillets: antérieur (le plus grand), postérieur et septal (le plus petit). La forme générale de la valve est elliptique, avec un long axe antéro-postérieur. Au niveau septal (septum auriculo-ventriculaire), on voit que l’anneau tricuspidien est situé environ 1 cm plus bas que l’anneau mitral. VM: valve mitrale. 
 
Ces feuillets sont fins (< 1 mm d'épaisseur) et arachnoïdes ; leurs commissures sont mal identifiables à l'échocardiographie. La valve est reliée à 3 piliers, dont un situé sur le septum ; le pilier antérieur, le plus important, est situé à l’origine de la bande modératrice du VD (travée musculaire qui relie le septum et la paroi antérieure du ventricule). La commissure antéro-septale est à 3-5 mm du nœud AV et du faisceau de His; la commissure postéro-septale est située en regard de l'abouchement du sinus coronaire (Figure 11.13). En cas de surcharge droite, la valve se dilate en direction latéro-postérieure, là où son anneau est interrompu. La valve tricuspide fait partie d'un système à basse pression (la pression systolique du VD est six fois plus basse que celle du VG). De ce fait, il n'est pas nécessaire qu'elle soit rigoureusement étanche; une petite fuite tricuspidienne existe chez > 50% de la population normale. Les valeurs normales de la valve tricuspide sont résumées dans le Tableau 11.3 [13,17].
 

     

Figure 11.13 : Valve tricuspide. A: vue chirurgicale depuis une atriotomie de l’OD (accès chirurgical latéral). Les 3 feuillets (A antérieur, P postérieur et S septal) sont de taille inégale : A > P > S. L’insertion septale est bordée par le triangle de Koch (noeud AV – tendon de Todaro – sinus coronaire), qui contient les faisceaux de conduction. NAV : noeud atrio-ventriculaire. CS : sinus coronaire. FO : fosse ovale. AAD : appendice auriculaire droit 15 ]. B: lorsque son anneau se dilate, la valve tricuspide s'agrandit en direction latéro-postérieure au niveau des feuillets antérieur et postérieur. Par ailleurs, cette image illustre bien la forme ovoïde de la valve avec son grand axe antéro-postérieur et sa base plus large au niveau du feuillet postérieur.
 
 
Valve pulmonaire
 
Alors qu'elle est fréquemment impliquée dans les pathologies congénitales, la valve pulmonaire est rarement concernée par les affections de l'adulte. Elle est positionnée en avant de la valve aortique, ne possède pas d'anneau fibreux (la chambre de chasse droite est entièrement musculaire) et compte trois feuillets: droit, gauche et antérieur situés en miroir par rapport à ceux de la valve aortique (Figure 11.1). Sa surface normale est 2 cm2/m2. Elle présente une petite fuite chez > 50% de la population normale.
 
 
Anatomie des valves cardiaques
Les deux valves auriculo-ventriculaires sont situées plus en arrière que la valve aortique; la valve pulmonaire est la plus antérieure. 
 
Valve mitrale: feuillet antérieur approximativement carré et feuillet postérieur en forme de croissant (divisé en 3 festons). Plans orthogonaux à l'ETO: vue bicommissurale 40-60° et vue long-axe 120-140°.
Valve aortique: 3 cuspides (coronaire droite, coronaire gauche et non-coronaire). Plans de coupe ETO: vue mi-œsophage court-axe 40° et long-axe 120-130°.
Valve tricuspide: 3 feuillets (antérieur, postérieur et septal).
Valve pulmonaire: 3 feuillets (droit, gauche et antérieur).


© CHASSOT PG, BETTEX D, Août 2011, dernière mise à jour Août 2018
 

Références
 
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11. Anesthésie et valvulopathies